Un rêve par-dessus l'épaule
Négligemment jeté d'un revers de mémoire leste, pend dans mon dos le poids du secret. Comme si le geste nonchalant suffisait pour absorber le cruel de la désolation.
Le plus étrange, c'est que cela paraît fonctionner à merveille. Nulle désagréable réminiscence ne vient troubler la quiétude apparente des jours endimanchés de sourires. A peine un arrière-goût amer sur la langue qui laisse transparaître la force du mal, comme une ancienne douleur à laquelle on s'habitue en claudiquant.
Lorsqu'il arrive parfois qu'un semblant de souvenir fugace balaie le décor, mes yeux se troublent aussitôt dans un brouillard déserté d'âme. Un battement de cils suffit à faire fuir l'indécent, un autre à oublier le moment en apnée où bât déjà mon cœur à se rompre.
Ainsi fuient les jours, délestés à ras-bord d'oubli...
Les nuits sont autrement plus rudes à manipuler. Le sommeil anesthésie ma pleine conscience, dilapidant le travail de ma volonté tenace. Il ne me reste plus alors qu'une seule solution : veiller, immerger les heures sombres dans un blanc opaque qui ne laisse rien filtrer d'hier.
Confusément, un leitmotiv gigote au fond de mes pensées, comme une blessure béante. Il y est question d'un non-droit au bonheur simple. Comme un énorme sens interdit qui en aurait barré l'accès, cadenassant l'espoir dans des chaînes monstrueuses d'où je ne pourrais jamais m'échapper.
Bizarrement, je ne cherche jamais à lutter, tête baissée, vaincue d'avance...