Un portrait qui en dit long
Planqué tout en haut d'une tour, au numéro 12 de la rue des Étoiles, son refuge est fait de murs en verre traversé de nuit et d'aurores boréales. De lourdes tentures aux couleurs chatoyantes ombrent les ardeurs du soleil au plus chaud de l'été. Sur le toit, une girouette titube, comme si elle tentait de se soustraire à l'attraction polaire qui l'enserre dans ses filets.
De la ville en bas montent des clameurs océanes. Elles pleurent parfois à son oreille assourdie de tempêtes chagrines et de gros grains.
C'est là, dans ce havre de paix factice, que parfois, lorsque un halo de pitié sincère l'entoure enfin de ses bras, elle se laisse aller au monde, rêvant de nonchalance sans fin et de paix pour l'éternité.
Oblongue, éthérée, pliée en deux sur sa douleur tenace, elle respire en haletant comme un jour sans fin. Sous sa peau tendre et diaphane se devine un réseau bleu de veines minuscules qui palpite à tout-va les jour de grands émois. Au creux de sa poitrine, un tambour-fantôme bat la chamade. Un chant d'apocalypse finit par s'emmêler dans les fils d'or de ses longs cheveux défaits.
Dans ses yeux, où un ciel en chamaille a pleuré en silence, une mélancolie étrange, pailletée d'étincelles fugaces alanguit le regard baigné de mémoire.
Bientôt, elle ne sait ni où ni quand, telle la fumée emportée par les vents, libre enfin de courir sur l'horizon, elle s'enfuira...