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Katie, à l'Ombre des Mots Songeurs

Poésie entre vie, couleurs et lumières, entre mes ratures et mes baz'Arts

Comment le roux pilla sans sonner

Publié le 14 Décembre 2014 par Katie à l'ombre des mots songeurs in Poèmes, etc...

 

 

une rose en noir et blanc 

 

Comment le roux pilla sans sonner 

 


 

Chose promise, chose due !

Si tu es prêt,  je vais te raconter l’histoire des écureuils devenus roux.

Je la tiens de ma triple bisaïeule, qui elle-même la tient de son amie de jadis, une sémillante sorcière avec qui elle fit la java au temps des splendeurs éphémères.


Cette dernière la tenait de source quasi certaine, de la bouche d’un amoureux transi qui, ayant fréquenté les hautes sphères bien avant l’Antiquité, avant même l’âge de Pierre, la lui aurait glissée à l’oreille un soir d'été, à l'heure où un doux romantisme distillait son parfum.


Il paraitrait que cela s'est passé le même jour que le drame de la Tour de Babel.


Peu de monde est au courant aujourd'hui, car le journaliste chargé de transmettre l’évènement à la postérité, très affecté par le brouhaha engendré par la multiplicité des sons nouveaux, et très triste de voir ainsi se clore le chapitre d’une belle humanité, n’assista pas à la dernière réplique et de ce fait ne put répandre comme il se doit la nouvelle.


C’est bien ce jour-là pourtant, après avoir créé les idiomes et condamné les hommes au charabia éternel, que Dieu, qui en avait aussi par-dessus la tête d’entendre les jérémiades des blancs se plaindre des noirs et des noirs se plaindre des blancs, décida dans sa grande sagesse et emporté par un formidable élan, de les rendre tous égaux par une même et unique couleur, qui serait le mélange des deux.


Pour ne pas irriter davantage le courroux déjà bien usé par la perte de la langue universelle, il décida de procéder en plusieurs étapes.


Les premiers jours se passèrent pour le mieux. Les différences s’amenuisaient sensiblement, personne ne s’apercevait de rien et il pouvait donc continuer son œuvre en toute quiétude.


Alors qu’il parvenait au bout de ses peines – il ne restait que l’Irlande et quelques alentours à traiter - il arriva pourtant ce qui devait arriver lorsque s’installe la routine : il oublia de s’abstenir de travailler le jour où la Lune subissant l’influence de la Terre qui se retrouvait régulièrement en froid avec le Soleil, se métamorphosa en une splendeur rousse à faire pâlir d’envie Mars en personne.


Lorsque Dieu commença une dernière fois à mélanger les couleurs, oubliant de mettre la main devant la bouche comme l’exige la bienséance et la pure délicatesse, la Lune éternua à faire trembler les murs et reculer les nuages, puis elle s’ébroua dans un geste plein de grâce et de volupté. C’est à ce moment précis que tout l’or cuivré reflété dans sa longue, sa très longue chevelure, s’infiltra dans les moindres recoins environnants, imprégnant l’air et son souffle à des kilomètres à la ronde d’un magnifique flamboiement. Le temps que le Créateur réalise que sa formule magique avait irrémédiablement tout fixé pour l’éternité et qu’il stoppe les dégâts, ce fut trop tard pour une poignée de personnes qui passèrent à la trappe ce jour-là.


La nouvelle se répandit dans une immense trainée de poudre.


Lorsqu’elle atteignit l’Egypte, Ramsès II en personne piqua une colère mémorable. Lui qui avait réussi après tant d’années de galère et d’effroyables mixtures à teinter sa chevelure de roux pour ressembler au vénéré et effrayant Seth, voilà qu’une fichue manipulation le faisait ressembler à monsieur, madame tout-le-monde. Il rageait à ébranler la grande pyramide qui menaça de s’écrouler sur place.
 
Le Seigneur Dieu était effondré d’avoir si mal calculé les choses. Il ne désirait pas mettre la planète à feu et à sang. C’est pourtant ce qui allait se passer s’il ne trouvait sur le champ de quoi remédier à sa gaffe monumentale.


Il faisait peine à voir, accablé sous le poids d’une telle responsabilité. Avachi, le front dans ses mains, il s’en alla méditer au calme, au fin fond de l’Eden.


C’est là que lui arriva comme un boomerang l’inspiration suprême.

 

Sortant de sa torpeur il finit par se rendre compte du manège d’une famille d’écureuils malicieux qui jouaient sous son nez.

Ils avaient l’air heureux, grimpant sur les troncs d'arbres à la vitesse de l'éclair sautant avec vivacité de branche en branche, et d’autres joliment assis, enroulés dans le panache de leur splendide queue, à dépiauter quelques noix volées au verger. En ces temps-là, les écureuils ne possédaient pas encore la couleur qui les a rendus célèbre, mais une insipide robe marron sans grande originalité, il faut bien en convenir. 

 

A les regarder avec plus d’attention, ils semblaient cependant souffrir d’un mal inconnu. S’approchant au plus près, il entendit une conversation bien étrange au sein de ce qui ressemblait à une concertation d’écureuils sages (enfin, il en déduisit qu’ils étaient sages au nombre de poils blancs qu’ils arboraient autour du cou !).

 

Il y était question de grande lassitude, due apparemment au manque  de différence entre les membres de cette peuplade, ce qui engendrait inexorablement la monotonie. Les chiffres de la mortalité dans la communauté avaient atteint des sommets en la matière et nul ne savait quoi faire pour l’enrailler.
  
Voilà ! Se dit Dieu en se grattant frénétiquement la barbe, il la tenait la solution pour calmer les susceptibilités agacées ! En plus, d’une pierre il ferait deux coups et tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes. La population roussie se transformerait en écureuils et la famille de ces derniers s’enrichirait d’une belle couleur à rompre l’insipide pauvreté monochrome.

Il s’en alla chercher sa baguette magique et d’une incantation divine dont il trouva la rime en chemin, commença par transformer les femmes et les enfants d’abord, puis les hommes qui restaient encore sur la place, en ces créatures rousses qui enchantent, aujourd’hui encore, nos contrées et autres détours de chemins.


Quant aux hommes qui avaient échappés à la magistrale transformation, ils vécurent des jours plus ou moins tourmentés tout au long des siècles suivants. Les pipolettes ayant bien fait leur besognes, nous connaissons aujourd’hui quelqu’uns des plus illustres parmi leurs descendants. Qui n’a jamais entendu parler de Sarah Ferguson, Nicole Kidman, Marlène Jobert, etc. etc. ?  Il y a aussi ce petit bluesman qui fait des merveilles et un grand tabac. Il commence même à faire parler de lui dans le Mississipi. Quel est son nom déjà ? Ah, oui ! Charlie Goyourway. Oui, un petit génie, vraiment. Cela me donne envie de te raconter son histoire, mais là il se fait tard et il me faut songer à me remettre au travail.

Une dernière chose, tant que je te tiens… j’ai entendu dire aussi que si les hommes descendent du singe, les roux descendent du chat… mais voilà encore une autre histoire…

Il va falloir cependant aller consulter les grimoires et, hum… le temps m’est précieusement conté !^^


 

FIN

 


 

 

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